Ilianie Devane

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Ilianie naquit à Louise, alors que les guerres se calmaient petit à petit, pendant cette période de l'Ultime Alliance, en l'an 982. Sa naissance aurait pu être très bien accueillie, si elle n'avait pas eu lieu du mauvais côté des draps. Le duc de Murville, déshonoré, reconnut tout de même l'enfant comme un possible héritier et pourvut à son éducation dans tous les domaines. Du moment que l'enfant n'approchait pas la demeure ducale.

Ainsi, Ilianie reçut une éducation très complète : écriture, lecture, arithmétique, musique, histoire, géographie… Son éducation incluait également les arts occultes et les arts de la guerre. Il s'avéra très vite qu'Ilianie possédait un certain talent pour le maniement de l'épée plutôt que pour celui de l'arc, et pour une magie agressive plutôt qu'une magie passive. Cependant, son enseignement magique s'interrompit brutalement à la mort de son maître, que personne ne remplaça. Ilianie mit donc toute son énergie dans l'art du combat à l'épée, gardant précieusement enfoui en elle son autre enseignement inachevé.

A la voir ainsi, on pourrait croire qu'Ilianie n'a jamais manqué de rien. C'est faux. Sa mère, très pauvre, ne percevait aucune aide financière du duc, à l'exception de l'éducation. Ainsi, si Ilianie pouvait être éduquée et se cultiver, sa mère et elle manquaient de l'essentiel : pauvre demeure, nourriture trop rare en ces temps encore troublés, difficulté à payer les soins… Ce fut d'ailleurs ce dernier élément qui fit succomber la mère d'Ilianie à une grave maladie. La jeune fille, alors âgée de 15 ans, ne pardonna jamais à son géniteur d'être resté sans agir. Furieuse, elle n'en continua pas moins son enseignement avec plus d'acharnement, demandant cette fois à être envoyée de temps en temps sur le terrain et payée en conséquence. Pour assurer sa survie.

Un jour, elle parcourrait le monde à cheval, l'épée au poing et le cœur sur la main.
Un jour, elle aiderait la reine à unir les peuples, elle s'arrangerait pour que ces situations de malaise n'existe plus.
Un jour, le soleil ne se lèverait plus que sur des visages heureux.
Quelle douce naïveté…

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Ilianie s'assit en soupirant sur un banc. Reprendre son souffle… juste un instant. Et surtout, retrouver son chemin. Elle posa la main sur la bourse pleine de louises que lui avait donné son maître d'armes, Tiaristan. Monsieur son maître désirait une nouvelle épée et, comme il était cruellement débordé, il avait chargé sa jeune apprentie de faire ses emplettes. Cette dernière détestait faire les courses, encore plus celles des autres. Ilianie jeta un regard boudeur à la capitale.

Le temps était plutôt doux en ce mois des Floraisons. Un ciel bleu où passaient peu de nuages surplombait la magnifique cité. Les fiers drapeaux au hibou s'agitaient sous une brise légère, cette même brise qui vint ébouriffer les cheveux détachés de la jeune fille, laissant quelques mèches blondes venir lui chatouiller le nez.

Ilianie, comme à son habitude lorsqu'elle n'était ni en entraînement, ni en mission, portait une tunique bleue-roi à la doublure blanche, ainsi qu'un pantalon de toile noir et une paire de bottes en cuir fauve. Il s'agissait d'une tenue très simple, la jeune fille n'était guère riche malgré la richesse de son horrible père. Horrible… L'était-il ? Ses sentiments la poussaient à hurler des insultes à l'encontre de cet homme. Elle se souvenait seulement d'un duc insensible qui avait laissé mourir sa maîtresse mais qui assurait l'éducation de son bâtard. Elle ne se souvenait même pas de l'avoir croisé une seule fois, ni lui ni son épouse officielle. Pourtant, il l'avait reconnu comme son enfant… Donc il avait du la voir. Sans doute était-elle alors trop petite pour s'en souvenir.

Son regard bleu-vert se posa sur la foule qui composait le marché de Louise. Des humains, mais également quelques nains, leurs plus proches voisins, ainsi que des démons. Rien d'inhabituel ici. Mais il y avait tellement de monde… il régnait dans la capitale une ambiance sans nulle autre pareille.

Ilianie parcourut encore un moment la foule et les rues de son regard perçant, puis elle se leva et prit sans hésiter la direction d'une petite ruelle, dans laquelle œuvrait le marchand d'armes que son maître lui avait recommandé. Elle ne possédait pas un excellent sens de l'orientation, mais sa mémoire l'aidait à compenser. Alors qu'elle passait devant un étalage de fruits et légumes, elle sentit une petite main se glisser dans sa bourse. La jeune fille, vive, attrapa le poignet coupable sans grande difficulté et tira à elle le petit garçon chapardeur. Son regard sévère se posa sur l'enfant.

- Ai-je besoin de te rappeler les bonnes manières, petit ?

Non mais… Que personne ne touche à ses biens ! Elle en avait trop peu pour se permettre de les distribuer. Même si dans ce cas présent, il s'agissait des louises de son maître, elle ne pouvait pas se permettre que ce dernier lui réclame une compensation pour le vol.

- Non… madame…

L'enfant devait avoir six ans, peut-être sept, tout au plus. Il était famélique et crasseux. Visiblement, la vie n'était pas tendre avec lui. Ilianie se radoucit et détendit son étreinte. Elle lui reprit les pièces subtilisées, sans lâcher la main de l'enfant.

- Si un jour tu veux devenir quelqu'un de bien, il va falloir que tu suives une autre voie !

L'enfant ne l'écoutait déjà plus. Ca ne l'intéressait pas de se faire sermonner et il perdait du temps pour aller voler d'autres poches. Que pouvait-elle y faire ? Tant qu'elle aurait elle-même du mal à subvenir à ses besoins, elle ne pourrait pas faire la charité. Son cœur se serra l'espace d'un instant. Décidément, elle ne pouvait pas le laisser partir comme ça, le remord la hanterait toute la nuit. La jeune fille replaça ses mèches d'un geste de la main et interpela le marchand de fruits et légumes.

- Bien le bonjour, monsieur ! Pourrais-je vous acheter une pomme ?
- Avec plaisir ma jeune dame.

Contre quelques louises de bronze, Ilianie troqua une pomme qu'elle tendit au petit garçon. Ce dernier, interloqué, regarda le cadeau en bredouillant un remerciement. Puis l'apprentie relâcha son étreinte, et le petit s'éclipsa rapidement. La jeune fille esquissa un sourire avant de se rendre au magasin d'armes. Le marchand, un vieil ami de son maître, sut tout de suite que conseiller à la demoiselle. Une belle épée à deux mains, finement ciselée… Ilianie la prit en main et fit quelques passes.

- N'est-elle pas un peu trop légère pour mon maître ?
- Ah ? Il ne vous a rien dit ? Elle est pour vous, cette épée ! Il considère que vous êtes sa meilleure apprentie et que vous avez bien méritée une petite récompense.

Ilianie écarquilla les yeux. Sans doute devait-elle rougir de plaisir et d'embarras, car elle sentit ses joues devenir plus chaudes. C'était sans conteste un magnifique cadeau… Sa première arme de futur chevalier !

La jeune demoiselle leva son arme bien haut, la faisant luire dans la clarté du soleil qui filtrait par la porte.

- Je vais l'appeler… "Aladora" !

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